Croix gammée
 

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1925 - la croix gammée

 

C'est dans le numéro de Breiz Atao où surgit la croix gammée - qui sera qualifiée de "celtique" - comme insigne de Breiz Atao (page 534, en en-tête des comptes-rendus d'activité des sections), qu'on lit l'annonce de la parution de Gwalarn, la "revue culturelle" des « Nordiques » Roparz Hemon et Olier Mordrel.


Breiz Atao n° 74, février 1925, p 524 et 534

Le 3 février 1929, Breiz Atao n° 34 (renumérotation du Parti Autonomiste Breton), devient hebdomadaire, et la croix gammée disparaît de la Une, où elle était reparue en en-tête, avec l'hermine, depuis le n° 14 du 01/04/1928. En mai 1930, en Une, une explication :

« Un concours artistique pour le nouvel insigne du Parti

Le Conseil Politique a décidé, dans sa séance de dimanche dernier, d'ouvrir un concours pour doter le Parti d'un nouvel insigne.

Depuis déjà longtemps, on pourrait dire depuis son adoption en 1925, on faisait contre l'insigne actuel du Parti, la croix gammée ou hevoud, des objections très fondées, en particulier, d'être déjà l'emblème d'associations étrangères à la Bretagne ayant un caractère politique très marqué.

La décision du Conseil Politique coupe court à toutes ces objections.

Un concours est donc ouvert entre les artistes. » [39]

La croix gammée est en effet l'insigne du parti nazi depuis 1920 :

« A Munich, en 1920, la foule acclame le drapeau dessiné par Hitler; fond rouge, disque blanc et croix gammée noire les couleurs du passé. Au cirque Krone, l'année suivante 6.500 personnes se pressent ; une deuxième réunion au même endroit huit jours après, puis une troisième, obtiennent un même succès. Hitler parle pendant des heures. Chargé jusqu'alors du service de la propagande, il est élu chef du mouvement. » [40]

Or, au sujet des deux symboles majeurs du nationalisme "breton" , Mordrel est très clair :

« Un parti national s'est fondé à Rosporden. Il a adopté un drapeau noir et blanc, inspiré du blason de nos anciens ducs, arborant un champ d'hermines sans nombre et neuf bandes, cinq noires pour les cinq évêchés de la Haute-Bretagne et quatre blanches pour ceux de la Basse. Il a choisi un insigne parmi les symboles magiques des vieux Celtes, le hévoud, qui n'est pas autre chose qu'une croix gammée, mais qui, au lieu de tourner dans le sens maléfique, tourne à droite, dans le sens bénéfique. » [41]

Ce fait est cité dans un article de juin 1999, « Blanche hermine, noir drapeau », (paru dans la revue Hopala), où l'on trouvera aussi des informations sur l'invention du drapeau et de l'hymne national par les autonomistes bretons.


Breiz Atao n° 99, 3 mai 1930, Une

En 1970, souhaitant absoudre Breiz Atao, Morvan Lebesque donne des précisions sur les dates :

« En 1923, donc bien avant que le public français eût entendu parler d'un agitateur allemand nommé Hitler, Breiz Atao avait choisi pour insigne l'hevoud celtique, symbole d'union et de paix en forme de croix gammée ; dès 1929, lorsque les premiers drapeaux nazis apparurent sur les écrans de l'actualité, il se hâta de le changer » [42]

Morvan Lebesque établit donc que la croix gammée a été adoptée en 1923 par Breiz Atao, en même temps que Morvan Marchal créait le gwenn-ha-du pour Breiz Atao, et qu'il se préparait à exposer au début 1924 les thèmes pangermanistes "nordistes" dans Breiz Atao.

Nous venons de voir qu'en 1929, la croix gammée fut retirée « lorsque les premiers drapeaux nazis apparurent sur les écrans de l'actualité ». Breiz Atao et le Parti Autonomiste Breton avouent que

« (...) depuis son adoption en 1925, on faisait contre l'insigne actuel du Parti, la croix gammée ou hevoud, des objections très fondées, en particulier, d'être déjà l'emblème d'associations étrangères à la Bretagne ayant un caractère politique très marqué. »

L'aveu est donc que, si le « public français » découvrait la croix gammée, le "public de Breiz Atao", lui, connaissait parfaitement le « caractère politique très marqué » de ce symbole, inconnu en Bretagne, mais fort connu dans les milieux pangermanistes où le nazisme se développait. Il était capital de supprimer cet insigne au moment où les autonomistes s'appuyaient pleinement sur la politique imposée de Moscou au PCF, soutien des autonomistes jusqu'en 1939.

Un militant nationaliste actuel, Divi Kervella, s'est essayé récemment à fournir une explication pour cette croix gammée :

« En Bretagne le Hevoud sera pris comme emblème au début du mouvement national moderne.

Dans les années vingt, on le trouve comme emblème du Parti National Breton, puis en 1933, avec une faucille posée dessus, comme emblème du mouvement Ar Falz qui regroupait les nationalistes bretons d'inspiration communiste.

Avec la montée en puissance du Parti nazi en Allemagne, le mouvement breton préféra abandonner cet emblème dans les années trente et se tourna vers le triskell. » [43]

L'organisation Ar Falz a été créée en 1933 par Yann Sohier en relation étroite avec François Debauvais, dans le cadre du Parti National Breton [44]. Il s'agit, en fait, d'un prolongement de Breiz Atao en direction des enseignants laïcs, très rétifs à l'enseignement du breton. Sohier entendait diffuser les thèmes de Breiz Atao, alors que les parents de ces enfants faisaient l'investissement de les envoyer le plus longtemps possibles à l'école pour apprendre le français et s'émanciper socialement.

Sohier joue la carte communiste mais se prononce pour le programme "SAGA" d'inspiration nationale-socialiste [45] élaboré par Mordrel pour le PNB. Lors de l'enterrement de Sohier, en 1935, c'est Mordrel qui prononce son éloge funèbre, en présence de Marcel Cachin pour le PCF. Ar Falz et sa croix gammée avec faucille sont révélateurs d'un double jeu qui apparaît bien dans les correspondances échangées et publiées après-guerre [46].

Quant à l'abandon de l'emblème, il est fort éphémère puisque, après une éclipse, le PNB remet la croix gammée dans son journal Breiz Atao, le 29 janvier 1933 [47], la veille de la prise du pouvoir d'Hitler. En 1936, on retrouve la croix gammée sur les cartes d'adhérents du PNB [48]. Elle coiffe toujours la rubrique « La vie du parti », le 20 mars 1938 [49] dans Breiz Atao. C'est sa dernière apparition.

Contrairement à ce qu'affirme le spécialiste, on ne trouve pas un seul triskell dans les 37 numéros de Breiz Atao qui suivent… Ce n'est qu' en 1940 qu'il devient l'insigne du PNB intégré au nazisme, comme substitut à la croix gammée : un branche de la croix disparaît, mais le symbolisme est strictement identique.

La réalité s'oppose donc aux justifications des militants nationalistes actuels. Il est impossible de prétendre que la croix gammée fut un motif purement décoratif, un symbole ésotérique ou religieux, quand on constate, en lisant Breiz Atao, les réticences conscientes devant un emblème très tôt connu comme celui du parti nazi. Ceux qui l'emportent contre ces réticences sont ceux qui défendent le nordisme, ceux que nous allons voir au milieu des organisations pangermanistes flamandes, comme Olier Mordrel, Morvan Marchal ou Roparz Hemon.

Carte du PNB, avec swastikas, 1936,
reproduite dans « Bretagne Île-de-France »,
septembre 2000, p. 10

« La vie du parti » : de Breiz Atao n° 167 - 29/01/1933 - p. 4,
au n° 298 - 20/03/1938 - p. 4

 

 

 



Ar Falz
n° 26, décembre 1935

 


[39] Breiz Atao n° 99, 04/05/1930

[40] Le Crapouillot, « Mystique hitlérienne », Jean Galtier-Boissière, juillet 1933, n° spécial, p. 56

[41] « Breiz Atao, histoire et actualité du nationalisme breton », Olier Mordrel, 1973 ; cité dans Hopala, « Blanche hermine, noir drapeau », Françoise Morvan, juin 1999 ; accessible sur Internet : http://membres.lycos.fr/leguenne/documents/gwen_ha_du.htm

[42] « Comment peut-on être Breton », Morvan Lebesque, p. 162

[43] « Emblèmes et symboles des bretons et des celtes », Divi Kervella, Coop Breizh, 1998, p. 65

[44] Ar Vro, n° 21, 10/1963, « Ar Falz et Yann Sohier », p. 46-63

[45] Ar Vro, n° 21, 10/1963, « Ar Falz et Yann Sohier », p. 50 ; Ar Falz n° 71-72, « Yann Sohier et Ar Falz - 1901-1935 », p. 20

[46] Voir Le Monde comme si, François Morvan, p. 217-18, 225-26

[47] Breiz Atao n° 167, 29/01/1933, p. 4, « La vie du parti »

[48] Bretagne Île-de-France, septembre 2000, p. 10

[49] Breiz Atao n° 282, 08/08/1937

 

  

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